Citations de Lacan
- « La place que j’occupe comme sujet de signifiant est-elle, par rapport à celle que j’occupe
comme sujet du signifié, concentrique ou excentrique ? Voilà la question. » (Écrits, pages 516-517)
- « […] la scène de l’Autre, où l’homme comme sujet a à se constituer […] »
(Séminaire 10, page 137)
- « En tant que nous sommes le sujet qui pense […] nous dépendons du champ de l’Autre, qui était là
depuis un bout de temps avant que nous venions au monde, et dont les structures circulantes nous déterminent
comme sujet. » (Séminaire 11, page 222)
- « […] la fonction du sujet, en tant qu’il est qu’il est celui que détermine le langage, est le seul départ
qui peut nous donner le fil conducteur […] » (Séminaire 12, séance du 10/03/1965)
Point de vue du modèle
Selon l'approche du modèle lacanien, le sujet humain est une entité abstraite composée de deux parties et d’un opérateur.
Le sujet est forcément une entité ternaire — un triplet, un ensemble de trois éléments.
- La partie qui représente le sujet dans l’ordre symbolique (« le sujet de signifiant »)
est le sujet barré. La partie qui reste dans le réel (« le sujet du signifié ») est l'être du sujet :
Lacan appelle ce reste réel l'objet petit a.
- L’opérateur est le langage, la structure des signifiants que Lacan nomme le grand Autre.
Le langage est à la fois le diviseur et le lien, parce que les deux parties du sujet humain demeurent toujours liées entre elles,
précisément par le processus de la division qui les crée.
Citations de Lacan
- « Par rapport à l’Autre, le sujet dépendant de cet Autre s’inscrit comme un quotient […] Il y a, au
sens de la division, un reste, un résidu. Ce reste […] c’est le petit a. » (Séminaire 10, page 37)
- « […] la psychanalyse nous apprend que le sujet, de par ce qui est l’effet même du signifiant,
ne s’institue que comme divisé, et d’une façon irréductible. Voilà ce qui sollicite de nous l’étude de ce qu’il en est du sujet
comme effet de langage […] » (Séminaire 15, séance du 13/03/1968)
- « C’est en tant que le sujet se situe et se constitue par rapport au signifiant, que se produit en lui
cette rupture, cette division, cette ambivalence, au niveau de laquelle se place la tension du
désir. » (Séminaire 7, page 366)
- « […] quelque chose qui est le reste, l’irréductible du sujet. C’est petit a. Le petit a
est ce qui reste d’irréductible dans l’opération totale d’avènement du sujet au lieu de l’Autre, et c’est de là qu’il va prendre
sa fonction. » (Séminaire 10, page 189)
- « L’expérience analytique nous montre […] que dans l’opération dont il s’agit il y a toujours un
reste […] que l’effet de l’opération n’est jamais un pur et simple
zéro […] » (Séminaire 12, séance du 03/03/1965)
Point de vue du modèle
La division signifiante installe le sujet humain dans la structure du langage.
Le processus de création du sujet est celui de la division en arithmétique entière, produisant un quotient et un reste.
Dans le cas de la division signifiante, nous posons avec Lacan le postulat que cette division n’est jamais une division arithmétique
exacte : « il y a toujours un reste non nul ».
La division s'applique à du réel, en l'occurrence le réel du sujet. Elle engendre le sujet barré qui est le
quotient au sens de la division. Le sujet barré s’associe à des signifiants en tant qu’éléments du langage. Dans l'opération de division,
il y a un reste réel : l’être du sujet, appelé aussi l’objet petit a.
L’objet petit a n’est pas représentable ; par contre, il peut être coupé, et produire à nouveau du sens
et encore un reste. C'est la curiosité d'interroger le mystère de l’objet petit a, essence réelle « irréductible »
du sujet, qui renouvelle la division : le sujet répète récursivement cette division en l'appliquant de nouveau à l'objet petit a,
et en obtenant continuellement à chaque étape un reste réel inaccessible.
Il est nécessaire de considérer la division signifiante dans une perspective ternaire, positionnant le
grand Autre (le langage) comme opérateur (le diviseur) entre les deux éléments qu’il produit : le sujet barré et l’objet petit a.
Division, coupure, castration
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Citations de Lacan
- « […] la castration est en tout cas ce qui règle le
désir […] » (Écrits, page 826)
- « […] le sujet se trouve lui-même situé comme tel dans le signifiant, en tant qu’il est
structuré par la coupure. » (Séminaire 6, séance du 20/05/1959)
- « […] le rapport le plus intime de l’homme à la coupure, en tant qu’il dépasse toutes
les coupures naturelles, qu’il y a cette coupure essentielle de son existence, à savoir qu’il est là [dans le réel] et il doit
se situer [dans le symbolique] dans ce fait même de l’avènement de la coupure. » (Séminaire 6, séance du 27/05/1959)
- « […] la coupure qu’instaure dans la vie de l’homme la présence même du
langage. » (Séminaire 7, page 325)
- « S’il n’y avait pas d’Autre […] il n’y aurait pas de
castration. » (Séminaire 10, page 274)
Point de vue du modèle
L’opération de division peut se nommer de trois façons principales, exprimant ainsi trois connotations
complémentaires :
- la division expose le point de vue de l'arithmétique, celui de la division entière ;
- la coupure (coupure signifiante) déclare le côté définitif d’un acte qui est celui de l’instauration
du sujet ;
- la castration sous-entend une blessure violente, ou bien une menace de blessure. Cette connotation, apposée au
processus langagier de la division signifiante, montre que la division peut se ressentir avec angoisse comme un acte douloureux en tant
que perte de la vérité.
Citations de Lacan
- « […] le sujet fait une première opération interrogative dans le grand A — combien
de fois ? […] le petit a en tant qu’il est justement ce qui représente le S [l’être du sujet] dans son réel
irréductible […] » (Séminaire 10, page 189)
- « Mais comment définir ce qu’est un acte ? Il est impossible de le définir autrement que sur le
fondement de la double boucle, autrement dit de la répétition. Et c’est précisément en cela que l’acte est fondateur du
sujet […] Le sujet, disons dans l’acte est équivalent à son signifiant. Il n’en reste pas moins
divisé. » (Séminaire 14, séance du 15/02/1967)
- « Il [l’acte] est instauration du sujet comme tel. C’est-à-dire que d’un acte véritable le sujet
surgit différent : en raison de la coupure sa structure est modifiée. » (Séminaire 14, séance du 22/02/1967)
- « Il s’agit du rapport premier, mais gros de tous les autres, de S1 à S2, du signifiant qui
représente le sujet pour un autre signifiant. » (Séminaire 16, page 311)
- « […] nous considérons S1 et, désignée par le signe S2, la batterie des signifiants.
Il s’agit de ceux qui sont déjà là […] S1 est celui qui est à voir comme intervenant. Il intervient sur une batterie
signifiante que nous n’avons aucun droit, jamais, de tenir pour dispersée, pour ne formant pas déjà le réseau de ce qui
s’appelle un savoir. » (Séminaire 17, pages 11-12)
Point de vue du modèle
La coupure est l'acte qui instaure le sujet en le divisant. Elle est un acte, car elle a cet effet
décisif « d'instauration ».
L'acte de coupure s'applique au réel du sujet, celui de l’objet petit a. En divisant le réel, la coupure
délivre un signifiant qui représente le sujet dans le champ de l'Autre : Lacan l’appelle le signifiant S1. Simultanément, Lacan
appelle S2 « un autre signifiant », auquel s’adresse le signifiant S1 « qui représente le
sujet ». Par extension, S2 dénote le savoir, c’est-à-dire l’addition des autres signifiants qui sont déjà là, l'accumulation
des signifiants S1 qui viennent s’ajouter au savoir.
Citations de Lacan
- « […] il n’y a pas de sujet s’il n’y a pas de signifiant qui le
fonde. » (Séminaire 5, page 189)
- « […] un sujet divisé, ce qui est de la nature même du sujet
humain. » (Séminaire 5, pages 430-431)
- « […] le sujet dans son existence […] en ceci justement qu’il ex-siste dans le
langage […] qu’il consiste en quelque chose qui est hors de lui, en quelque chose qu’il ne peut saisir dans sa
nature propre de langage qu’au moment précis où lui, comme sujet, doit s’effacer […] derrière
un signifiant […] » (Séminaire 6, séance du 10/12/1958)
- « […] il n’y a de sujet que par le signifiant, le passage au
signifiant. » (Séminaire 10, page 178)
- « Le signifiant se produisant au champ de l’Autre fait surgir le sujet de sa signification.
Mais il ne fonctionne comme signifiant qu’à réduire le sujet en instance à n’être plus qu’un signifiant, à le pétrifier du
même mouvement où il l’appelle à fonctionner, à parler, comme sujet. » (Séminaire 11, pages 188-189)
Point de vue du modèle
Le sujet barré désigne le quotient de la division, c’est-à-dire la part du sujet (sujet que l’on a défini comme
une entité ternaire) qui est associée à des signifiants, celle qui est marquée par le signifiant.
C’est souvent cet élément que l’on évoque implicitement chaque fois que l’on parle simplement du sujet. Bien sûr,
cette formulation est un raccourci, puisqu’elle semble considérer le reste comme partie négligeable — ce qu’il n’est pas au
contraire, et c’est justement l’objet du modèle lacanien. Par contre, ce raccourci se révèle utile si l’on est préoccupé seulement
des structures sociales des communautés d’êtres humains. Le sujet barré est en effet l’élément social du sujet.
Le sujet humain étant aliéné à la structure du langage, « il est certain qu’il n’y a de sujet que
barré », donc déterminé par le langage et associé à des signifiants dans le champ de l’Autre ; « sinon il ne
serait pas humain ». Le sujet barré est celui qui parle dans une chaîne signifiante, et aussi celui dont on parle dans
d’autres chaînes signifiantes. Lacan utilise les termes de « parlêtre », de « sujet qui parle »,
de « sujet parlant », ou bien — de manière équivalente en miroir —
de « sujet parlé », pour désigner ce sujet qui ex-siste en dehors, c’est-à-dire dans l’inter-signifiance.
Citations de Lacan
- « Ce quotient et ce reste restent ici en présence l’un de l’autre, et si l’on peut dire,
se soutenant l’un par l’autre […] » (Séminaire 6, séance du 20/05/1959)
- « […] petit a est de l’ordre du réel. » (Séminaire 13, séance du 05/01/1966)
- « […] le reste [de la division] y est donné par un petit a qui en est l’élément
irréductible. » (Séminaire 14, séance du 01/03/1967)
- « [l'objet petit a] […] c’est un produit […] de l'opération du langage […]
ce petit a, si je l’ai dénommé je ne l’ai pas inventé […] » (Séminaire 14, séance du 26/04/1967)
- « […] je l’ai appelé petit a, c’est à savoir votre substance, votre substance de sujet, pour autant que,
comme sujet, vous n’en avez aucune, sinon cet objet chu de l’inscription
signifiante […] » (Séminaire 14, séance du 24/05/1967)
- « Si nulle part dans l’Autre ne peut être assurée la consistance de ce qui s’appelle la vérité,
où donc est-elle, la vérité, sinon à ce qu’en réponde la fonction du petit a ? » (Séminaire 16, page 24)
Point de vue du modèle
Lors de l’opération de la division signifiante qui crée le sujet en tant qu’entité ternaire, le reste (au sens
de la division en arithmétique entière) correspond au réel de l’existence du sujet, ce qui échappe à la représentation par le
langage — alors que le quotient correspond au sujet barré, résultat attendu sur le plan du langage. Le reste réel de la division
peut se nommer de trois façons non exclusives : l’être du sujet, l’objet petit a, ou bien l’élément signifié.
En incarnant « l’élément irréductible » de la division, l’objet petit a recèle
la vérité du sujet ; il constitue sa « substance », son corps vivant,
sa « livre de chair ». Il détient une valeur intrinsèque, celle du signifié, tandis que le sujet barré,
embarqué dans l’enchevêtrement des signifiants, s’alanguirait sans substance s’il était seul.
Citations de Lacan
- « […] la seule notion d’Imaginaire, en tant que le départ de celle-ci est la référence au corps
et au fait que sa représentation […] n’est que le reflet de son organisme. » (Séminaire 22, séance du 10/12/1974)
- « […] on ignore des tas de choses quant à son propre corps, et ce qu’on sait est d’une toute autre nature :
on sait des choses qui relèvent du signifiant. » (Séminaire 23, séance du 11/05/1976)
Point de vue du modèle
Le moi est un représentant fournissant une représentation à partir de l’image perceptive du corps.
Il se forme par rapport à l’image i(a) qui est un « reflet du réel renvoyé par l’imaginaire » :
le moi s’interpose comme un représentant spéculaire, et invite l’image du corps à venir se loger au sein de l’ordre symbolique.
Le moi se comporte dans le psychisme humain à la façon d’un signifiant parmi d’autres signifiants. Le narcissisme
illustre la complicité permanente entre le moi qui est un représentant, et l’image i(a) qui est une représentation immédiate.